vendredi 26 juin 2015

Les Taxis Parisiens, vus de l'extérieur.....

Cette crise des taxis contre Uber et les VTC m'a surtout permis de constater la violence dont se sont montrés capables une minorité des premiers, et la faiblesse dont a fait preuve le gouvernement, encore une fois face à une minorité d'enragés, de casseurs. Faiblesse car ils n'ont rien trouvé de mieux que de céder, encore une fois.

Personnellement, je ne suis ni pour ni contre Uber Pop, bien au contraire, n'habitant pas à Paris, ni dans une grande ville, je n'en ai jamais eu le besoin, mais je dois bien reconnaître que je trouve le principe séduisant. Peut être tout simplement que ce principe, permettant  de faire baisser le coût du travail, permettrait à plus de travailler, tout simplement. Enfin je ne sais pas.


Tout cela me rapelle furieusement un chapitre de "Nââânde", de Eriko Nakamura, une Japonaise, qui, après avoir épousé un Français,un parisien se retrouve à vivre à Paris, ce qui, dans bien des cas se trouve être assez traumatisant pour les Japonais, habitués à une certaine qualité de vie.

Un petit peu de publicité pour cet excellent livre, qui mérite d'être lu, et pas seulement pour le chapitre concernant les taxis, la comparaison entre les français les parisiens et les japonais remet pas mal de choses à leur place, c'est assez marrant.


"Nââânde, les tribulations d'une Japonaise à Paris", de Eriko Nakamura, sur le site de la FNAC : http://chorten.net/7
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Le taxi

     J'ai toujours aimé prendre le taxi à Tokyo, quelle que soit l'heure du jour ou de la nuit. Il suffit que je lève légèrement la main et en moins de 30 secondes une voiture jaune s'arrête devant moi. La porte s'ouvre dans un souffle d'air comprimé, je m'installe confortablement sur la banquette arrière, et avant même que j'aie pu saluer le chauffeur, il me souhaite la bienvenue : Irashaimassé !

Les chauffeurs japonais conduisent en douceur , leurs gants blancs glissent sur le volant. L'intérieur de leur  voiture est toujours d'une propreté irréprochable. Bien sûr, il arrive que les gants ne soient pas aussi immaculés qu'ils devraient l'être, mais vous ne pourrez jamais vous retrouver dans une voiture qui sent la sueur ou le McDo, avec un chauffeur qui téléphone comme si vous n'étiez pas là! Souvent, il m'arrive même de m'endormir pendant le trajet car je sais qu'arrivée à destination, le chauffeur me reveillera en douceur et sans avoir profité de mon sommeil pour faire un détour... Bref, à Tokyo, une Japonaise se sent dans un taxi comme dans la voiture de son père. Alors qu'à Paris, j'ai toujours l'impression d'entrer dans la maison de quelqu'un... Sans y avoir été vraiment invitée.

   Un soir, j'allais retrouver Charles-san pour dîner dans un restaurant de l'avenue des Gobelins, à deux pas de la rue Mouffetard, pour fêter la Saint Valentin. A 20 h 15, je suis sur le trottoir de l'avenue Kleber et je fais de grands gestes plutôt ridicules pour arrêter un taxi. Au bout de dix minutes, un chauffeur s'arrête, et se montre d'emblée plutôt aimable, me demandant si la musique de la radio ne me dérange pas. Il m'annonce qu'il y a des embouteillages, et qu'il vaut donc mieux prendre le périphérique, il va jusqu'à la porte d'Auteuil alors que la porte Maillot est à deux minutes de chez nous.... "Mais après tout, il connait mieux son métier que moi", me dis-je . Une fois sur le périphérique, on s'arrête net. Un panneau électronique annonce un accident : trente minutes jusqu'à la porte d'Orléans ... Le chauffeur commence à devenir nerveux : "je vais sortir à la prochaine porte et prendre le boulevard des Maréchaux." Il sort donc du périphérique et nous tombons sur un boulevard des Maréchaux complètement saturé. Le chauffeur me regarde dans le rétroviseur : " à la prochaine porte, je récupère le périph', c'est plus raisonnable." Je me hasarde : "mais est-ce qu'il ne vaut pas mieux rentrer dans Paris et passer par l'intérieur ? - Surtout pas ! on va perdre un temps fou !"

   Sur le périphérique, la situation n'a évidemment pas évolué. On avance mètre par mètre jusqu'à une voiture tombée en panne en pleine voie. Et là, soudain, au lieu de la doubler comme les autres conducteurs, le chauffeur se colle contre son pare-chocs et commence à accélérer. Nââânde !? La conductruce, interloquée se retourne et fait de grands gestes, mais le chauffeur lui fait signe que tout va bien. Je me demande si je ne suis pas tombée sur un fou... Mais je suis trop terrorisée pour lui demander ce qui se passe. Ou même dire quoi que ce soit. Le chauffeur pousse la voiture cinq mètres plus loin, puis déboite et reprend sa route comme si de rien n'était. Je n'en reviens pas. Cela partait d'un bon sentiment : pousser la voiture en panne de cette dame sur le bas côté pour qu'elle ne dérange pas la circulation. Mais cela a été fait à la parisienne : sans un mot d'explication pour elle comme pour moi et avec un savant mélange d'assurance et de grossièreté.  Bref, de façon "cavalière".

Trente minutes après, on arrive porte d'Italie où je m'attends à ce qu'il sorte et prenne l'avenue d'Italie, qui donne directement sur l'avenue des Gobelins. Mais bizarrement, il continue jusqu'à la porte de Bercy. Quand il se gare enfin devant le restaurant, j'ai vingt minutes de reetard et le compteur affiche...  43 euos. J'ose une remarque à la parisienne : "43 euros, c'est un peu cher pour aller de l'avenue Kléber à l'avenue des Gobelins vous ne trouvez pas ?" Mais sa réponse est encore plus à la parisienne : "c'est ce qu'il y a marqué sur le compteur, madamme. Si vous n'avez pas les moyens de vous payer le taxni, faut prendre le métro."

   Au Japon, ce genre de choses ne peut arriver. D'abord, parce que tous les chauffeurs de taxi sont salariés d'une compagnie et leur salaire est fixe, ce qui évite les tentations. Mais surtout, le chauffeur de taxi japonais est là pour que votre trajet se passe le mieux possible, tandis que le chauffeur de taxi parisien semble parfois là pour vous accompagner... dans la mesur où cela ne le dérange pas trop. Un jour je devais aller près de la Concorde, c'est à dire à vingt minutes à pied de chez moi. Comme il pleuvait, j'ai arrêté un taxi en sortant de la maison. Il a ouvert sa fenêtre et m'a demandé  : "vous allez où ? - à la Concorde - c'est juste à côté, je ne fais pas de si petites courses." Il a remonté sa fenêtre et il est parti. Nââânde !? à Tokyo, un taxi acceptera toujours de vous conduire, même pour cent mètres ! Mais ce jour là, je ne connaissais pas encore la pire habitude des taxis parisiens: la fin de service.
Après notre dîner de Saint Valentin, avec Charles-san, nous avons cherché longtemps un taxi pour rentrer. Finalement nous en voyons un arriver sur le boulevard et Charles-san fait de grands gestes pour l'arrêter. Le chaufeur baisse sa vitre et nous demande : "vous allez où ? - A l'étoile répond Charles-san - désolé, c'est pas sur mon chemin." Et il repart. Nââânde !? "Mais nous ne sommes pas là pour faire du stop", fais-je remarquer à Charles-san. "Je sais, mon amour, mais il rentre dans le 95 et ne veut pas faire un détour." Dix minutes plus tard, nous arrêtons donc un autre taxi qui refuse de nous conduire car il rentre dans le 93, puis un autre qui va dans le 94. Nââânde !? La seule chose que l'ai trouvé à dire n'a pas mis Charles-san de très bonne humeur : "Charles-san, tu leur as bien dit que nous allions les payer ?"


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